40 ans du lycée hôtelier de Saint-Chély-d’Apcher
On ne compte plus les étoilés qui se sont forgés au lycée hôtelier du Sacré-Cœur de Saint-Chély-d’Apcher : Sébastien Bras, Régis & Jacques Marcon, Emmanuel Renaut… Mais qu’ils soient étoilés ou non, tous ont trouvé ici les valeurs professionnelles et humaines essentielles à leur vie. Retour sur 40 ans de passion !
Chaque année au printemps, le lycée hôtelier du Sacré-Cœur met les petits plats dans les grands à l’occasion de la Journée de parrainage et de remise des rapports de stage… Parmi toutes celles organisées, 2016 restera marquée par la présidence en cette date anniversaire de Jacques Marcon*** et son cortège de 8 parrains et marraines, anciens élèves étoilés et distingués : Marielle Droisneau, directrice de salle de la Villa Madie*** ; Sylvie Faucher, maître chocolatière ; Alexandre Bourdas**, Cyril Attrazic*, Nicolas Fages*, Lionel Giraud*, Cyrille Zen* et Pierre Augé dit Petit Pierre (vainqueur Top chef 2014). Le 15 mars au matin, chacun d’entre eux se souvient : « Ça a toujours été une journée très importante. Une fois, nous avons même vu arriver Georges Blanc en hélicoptère. On applaudissait tous ! » raconte Cyril Attrazic. « Un trois étoiles qui vous remet une distinction, ça pousse. C’est un moteur, qui aide à foncer dans cet axe-là. Qui crée un enchaînement très positif », ajoute Lionel Giraud.
L’excellence imposée
Quand on pénètre dans l’histoire du Sacré-Cœur de Saint-Chély, très vite s’impose la figure tutélaire de frère Joseph Gibelin. Initiateur et grand ordonnateur de ce projet, il fut pendant longtemps « LA » porte d’entrée du lycée hôtelier. « Si on était motivé après l’entretien qu’il nous faisait passer, c’est qu’on y tenait vraiment », rapporte Cyrille Zen. Tous se souviennent de lui comme de quelqu’un à la fois « dur et très humain », « il aimait ses élèves profondément, il tirait tout le monde vers le haut, il voulait que tous donnent le meilleur d’eux-mêmes ». « Le contexte était différent mais il nous a ouvert les yeux sur une ligne de conduite à adopter », souligne Jacques Marcon, qui fut envoyé là pour cette rigueur que son père avait également partagée. Après les épreuves, la remise des résultats en était une nouvelle « il valait mieux être dans les trois premiers ». Nicolas Fages se souvient comme si c’était hier de l’annonce du classement qui débutait toujours par le bas de l’échelle, « les mouches volaient et les tables vibraient ». Heureux de ne pas encore avoir entendu prononcer son nom, il eut bientôt peur d’avoir été oublié puis se réjouit de son arrivée 3e. « Troisième sur 42 ce n’est pas mal, mais 1er ce serait encore mieux », lui dit frère Gibelin. Si l’homme n’est plus là, l’esprit demeure. « Après être passés entre ses mains, la rigueur des palaces nous semblait plus simple », confie Lionel.
« Notre école appelle vers les sommets. »
L’atout cœur
En termes de rigueur, il y a celle du climat qui forge les caractères et fait de Saint-Chély « un cas très particulier ». « En Lozère, il y a de gros travailleurs. Il faut être assez droit. Et comme on s’y trouve un peu loin de tout, on est plus proche de ce qu’on a en soi, comme on l’est des uns et des autres. « La force de Saint-Chély, c’est son internat. Une famille se créée, comme à l’Armée, on se solidarise, c’est un rapprochement authentique qui permet de passer le plus dur. »» « Ce que j’ai vécu ici m’accompagne tous les jours, renchérit la chocolatière Sylvie Faucher, ce sont les valeurs que j’aime à transmettre ». Un vrai réseau, avec une très haute définition ! « Un cocon à l’air pur, où l’on est concentré sur son travail. » « à 20 ans, garçons et filles étaient dans une aile séparée, se souvient Jacques Marcon. On nous disait, vous êtes des moines. » « Tous nos amis viennent de Saint-Chély, dira un autre. On y a vécu des moments exceptionnels, c’est un terreau, une base solide. » Eh ! oui, Saint-Chély est une terre fertile où une graine en appelle une autre, pas du génétiquement modifié. « C’est un devoir pour nous de transmettre, dira encore Lionel. Venir ici pour cette journée nous permet de marquer l’intérêt que l’on a à donner cette envie. » Tandis que Jacques ajoute : « Ce qui compte c’est de faire et se faire plaisir, dans un trois étoiles comme dans un restaurant d’hôpital. » En passant d’une section hôtelière de 46 élèves à un lycée des métiers de la gastronomie et de l’hôtellerie de 483 élèves et 170 enseignants, et ce en 40 ans, le lycée hôtelier de Saint-Chély – 1er lycée privé de France sous contrat d’état – a initié des parcours aussi riches que variés.
La somme des possibles
Cette somme des possibles, aujourd’hui comme hier, les jeunes la perçoivent. Car, au sortir des cuisines, l’un d’entre eux lance dans un éclat de rire : « Prenez-moi en photo maintenant car dans dix ans, je ne sais pas où je serai ! » La rigueur, la discipline, l’esprit d’équipe et la bonne humeur, voilà ce qui fait battre le cœur de Saint-Chély. Après Monsieur Brunet, ancien Chef des Travaux qui se plut à citer Confucius — « Choisissez un travail passionné et vous ne travaillerez pas un seul jour de votre vie » (entendu vous trouverez du travail mais n’en souffrirez pas et non l’inverse) — c’est au tour du directeur Jacky Ribeyre de prendre la parole lors de la cérémonie. L’homme qui mène les troupes est aussi discret qu’endurant. Détenteur d’un ou deux records du monde sur planche à voile (ainsi que le souligne son prédécesseur au micro), champion de ski de fond (cet hiver il vient de boucler en 5 h 30 les 91 km de la Vasalopette, « une expérience de vie »), il prononce des mots que l’on aimerait entendre plus souvent : « Le Sacré-Cœur a établi un partenariat entre professionnels, enseignants, éducateurs et élèves. Nous allons bien au-delà du référentiel de l’éducation nationale. Notre école appelle chacun vers les sommets. Notre ambition n’est pas jumelée à la prétention. » Et de conclure ainsi avec émotion : « S’ouvre ici le sillon de votre vie professionnelle et celui d’une vie familiale que je vous souhaite en forme de plénitude. » Le frère Gibelin organisait savamment ces journées dans l’idée de rassembler autour de lui les forces et moyens indispensables pour que perdure cette aventure. En ce temps de restrictions, souhaitons que survivent nos passions.
→ Corinne Pradier
Hommage
En 1995, lors de sa victoire au Bocuse d’Or, Régis Marcon avait préparé entre autres plats un poisson dénommé «Bar du frère Gibelin». « Qu’il trouve à travers ce plat, que je dédie à sa mémoire, le témoignage de ma reconnaissance et de mon admiration… Il voulait faire de ses élèves des hommes debout, soucieux de perfection, fiers de leur métier et amoureux de leur art. » Son enthousiasme lui donne raison.
www.ensemble-sacre-coeur.fr/lycee-des-metiers-hotellerie.html
Chaque année au printemps, le lycée hôtelier du Sacré-Cœur met les petits plats dans les grands à l’occasion de la Journée de parrainage et de remise des rapports de stage… Parmi toutes celles organisées, 2016 restera marquée par la présidence en cette date anniversaire de Jacques Marcon*** et son cortège de 8 parrains et marraines, anciens élèves étoilés et distingués : Marielle Droisneau, directrice de salle de la Villa Madie*** ; Sylvie Faucher, maître chocolatière ; Alexandre Bourdas**, Cyril Attrazic*, Nicolas Fages*, Lionel Giraud*, Cyrille Zen* et Pierre Augé dit Petit Pierre (vainqueur Top chef 2014). Le 15 mars au matin, chacun d’entre eux se souvient : « Ça a toujours été une journée très importante. Une fois, nous avons même vu arriver Georges Blanc en hélicoptère. On applaudissait tous ! » raconte Cyril Attrazic. « Un trois étoiles qui vous remet une distinction, ça pousse. C’est un moteur, qui aide à foncer dans cet axe-là. Qui crée un enchaînement très positif », ajoute Lionel Giraud.
L’excellence imposée
Quand on pénètre dans l’histoire du Sacré-Cœur de Saint-Chély, très vite s’impose la figure tutélaire de frère Joseph Gibelin. Initiateur et grand ordonnateur de ce projet, il fut pendant longtemps « LA » porte d’entrée du lycée hôtelier. « Si on était motivé après l’entretien qu’il nous faisait passer, c’est qu’on y tenait vraiment », rapporte Cyrille Zen. Tous se souviennent de lui comme de quelqu’un à la fois « dur et très humain », « il aimait ses élèves profondément, il tirait tout le monde vers le haut, il voulait que tous donnent le meilleur d’eux-mêmes ». « Le contexte était différent mais il nous a ouvert les yeux sur une ligne de conduite à adopter », souligne Jacques Marcon, qui fut envoyé là pour cette rigueur que son père avait également partagée. Après les épreuves, la remise des résultats en était une nouvelle « il valait mieux être dans les trois premiers ». Nicolas Fages se souvient comme si c’était hier de l’annonce du classement qui débutait toujours par le bas de l’échelle, « les mouches volaient et les tables vibraient ». Heureux de ne pas encore avoir entendu prononcer son nom, il eut bientôt peur d’avoir été oublié puis se réjouit de son arrivée 3e. « Troisième sur 42 ce n’est pas mal, mais 1er ce serait encore mieux », lui dit frère Gibelin. Si l’homme n’est plus là, l’esprit demeure. « Après être passés entre ses mains, la rigueur des palaces nous semblait plus simple », confie Lionel.
« Notre école appelle vers les sommets. »
L’atout cœur
En termes de rigueur, il y a celle du climat qui forge les caractères et fait de Saint-Chély « un cas très particulier ». « En Lozère, il y a de gros travailleurs. Il faut être assez droit. Et comme on s’y trouve un peu loin de tout, on est plus proche de ce qu’on a en soi, comme on l’est des uns et des autres. « La force de Saint-Chély, c’est son internat. Une famille se créée, comme à l’Armée, on se solidarise, c’est un rapprochement authentique qui permet de passer le plus dur. »» « Ce que j’ai vécu ici m’accompagne tous les jours, renchérit la chocolatière Sylvie Faucher, ce sont les valeurs que j’aime à transmettre ». Un vrai réseau, avec une très haute définition ! « Un cocon à l’air pur, où l’on est concentré sur son travail. » « à 20 ans, garçons et filles étaient dans une aile séparée, se souvient Jacques Marcon. On nous disait, vous êtes des moines. » « Tous nos amis viennent de Saint-Chély, dira un autre. On y a vécu des moments exceptionnels, c’est un terreau, une base solide. » Eh ! oui, Saint-Chély est une terre fertile où une graine en appelle une autre, pas du génétiquement modifié. « C’est un devoir pour nous de transmettre, dira encore Lionel. Venir ici pour cette journée nous permet de marquer l’intérêt que l’on a à donner cette envie. » Tandis que Jacques ajoute : « Ce qui compte c’est de faire et se faire plaisir, dans un trois étoiles comme dans un restaurant d’hôpital. » En passant d’une section hôtelière de 46 élèves à un lycée des métiers de la gastronomie et de l’hôtellerie de 483 élèves et 170 enseignants, et ce en 40 ans, le lycée hôtelier de Saint-Chély – 1er lycée privé de France sous contrat d’état – a initié des parcours aussi riches que variés.
La somme des possibles
Cette somme des possibles, aujourd’hui comme hier, les jeunes la perçoivent. Car, au sortir des cuisines, l’un d’entre eux lance dans un éclat de rire : « Prenez-moi en photo maintenant car dans dix ans, je ne sais pas où je serai ! » La rigueur, la discipline, l’esprit d’équipe et la bonne humeur, voilà ce qui fait battre le cœur de Saint-Chély. Après Monsieur Brunet, ancien Chef des Travaux qui se plut à citer Confucius — « Choisissez un travail passionné et vous ne travaillerez pas un seul jour de votre vie » (entendu vous trouverez du travail mais n’en souffrirez pas et non l’inverse) — c’est au tour du directeur Jacky Ribeyre de prendre la parole lors de la cérémonie. L’homme qui mène les troupes est aussi discret qu’endurant. Détenteur d’un ou deux records du monde sur planche à voile (ainsi que le souligne son prédécesseur au micro), champion de ski de fond (cet hiver il vient de boucler en 5 h 30 les 91 km de la Vasalopette, « une expérience de vie »), il prononce des mots que l’on aimerait entendre plus souvent : « Le Sacré-Cœur a établi un partenariat entre professionnels, enseignants, éducateurs et élèves. Nous allons bien au-delà du référentiel de l’éducation nationale. Notre école appelle chacun vers les sommets. Notre ambition n’est pas jumelée à la prétention. » Et de conclure ainsi avec émotion : « S’ouvre ici le sillon de votre vie professionnelle et celui d’une vie familiale que je vous souhaite en forme de plénitude. » Le frère Gibelin organisait savamment ces journées dans l’idée de rassembler autour de lui les forces et moyens indispensables pour que perdure cette aventure. En ce temps de restrictions, souhaitons que survivent nos passions.
→ Corinne Pradier
Hommage
En 1995, lors de sa victoire au Bocuse d’Or, Régis Marcon avait préparé entre autres plats un poisson dénommé «Bar du frère Gibelin». « Qu’il trouve à travers ce plat, que je dédie à sa mémoire, le témoignage de ma reconnaissance et de mon admiration… Il voulait faire de ses élèves des hommes debout, soucieux de perfection, fiers de leur métier et amoureux de leur art. » Son enthousiasme lui donne raison.
www.ensemble-sacre-coeur.fr/lycee-des-metiers-hotellerie.html