Restaurateurs et BTP : premier bilan mitigé

Depuis quelques semaines, les restaurateurs peuvent accueillir les professionnels du BTP à midi dans un cadre réglementaire précis. (©Thomas Bournel)

L’article 40 du décret du 4 octobre 2020 fixe le cadre réglementaire pour l’ouverture dérogatoire des restaurants conventionnés pour l’accueil des professionnels du BTP à midi. « C’est un petit plus pour les restaurateurs mais beaucoup de confort pour les salariés du BTP dont les conditions de travail sont rudes », explique Marc Torre, responsable du service Commerce, tourisme et service à la personne à la Chambre du commerce et d’industrie du Puy-de-Dôme Clermont Auvergne Métropole. Une cinquantaine de restaurants sont ainsi référencés pour cette opération «Restauration sous contrat» mise en place en concertation avec l’Umih, la FFB, la CAPEB, la Chambre des métiers et bien sûr, la préfecture du Puy-de-Dôme. Côté règles : respect des règles de distanciation (2 mètres entre chaque table), quatre personnes par table maximum et toutes provenant du même chantier… « Des règles contraignantes c’est vrai, mais l’effet est tout de même positif. C’est bon pour le moral. »

Davantage de clients en périphérie
« Certainement une bonne idée sur le papier » , selon Emmanuel Balsan (Le 41, avenue Julien à Clermont-Ferrand) « La réalité, c’est que nous n’avons pas de client ». La faute au centre ville peut-être… En revanche, pour Didier Aubry, patron de la Maison jaune à Châteaugay, « ça marche plutôt bien avec 100 couverts par semaine environ. Si j’ajoute environ 200 plats à emporter, j’approche mes 300-350 repas hebdomadaires réalisés en temps normal. » Pour ce restaurant ouvrier situé à proximité de nombreuses zones de chantiers (la zone de Ladoux est toute proche), il a toutefois fallu se résigner à accepter une moindre marge : « Les plats à emporter sont vendus moins chers et nous avons plus de frais en raison des contenants notamment. » Mais bon an mal an, Didier Aubry apprécie : « Avec le chômage partiel, ça fait la maille. J’ai signé des conventions avec une vingtaine d’entreprises donc pour moi, cette mesure, c’est pas mal. »
A L’Overnial (notre photo), Frédéric Maisy est plus mesuré même s’il reste positif. « L’opération a eu le mérite de remettre le personnel au travail car après une année, c’est essentiel… Elle a aussi été l’occasion pour moi de développer encore un peu plus ma carte de plats à emporter et de ce côté-là, ça a boosté les ventes. Mais avec le BTP, même si j’ai signé des conventions avec une dizaine d’entreprises, on tourne plutôt à dix clients par jour. »

Faire la police
Pour tous les patrons de ces restaurants conventionnés, la difficulté est la même : « Nous devons rester vigilants car d’un coup, tous les clients se prétendent du bâtiment », sourit Didier Aubry. « Alors on vérifie scrupuleusement les code NAF et beaucoup viennent déjeuner avec leur tampon d’entreprise. » Même son de cloche chez Frédéric Maisy : « Pas question de fermer les yeux. Du coup, on se retrouve dans des situations délicates, à faire la police avec nos propres clients. Certains travaillent dehors sur le terrain mais n’ont pas le bon code NAF… Alors ça fait plaisir d’apporter un peu de confort à ces professions du BTP mais ça fait aussi un peu mal au cœur de ne pas pouvoir accueillir certains dont les conditions de travail sont rudes aussi. » Marc Torre comprend : « C’est un premier pas mais on joue le jeu dans le respect des règles préfectorales. J’aurais aimé moi aussi un élargissement à d’autres professions comme les parcs et jardins. Mais la logique est de ne pas aller trop vite, la prudence reste de mise. Dès que les indicateurs seront meilleurs, j’espère que les services de l’Etat élargiront les codes d’activité éligibles à cette restauration sous contrat. »